Avant de commencer à aborder les dépenses de matériel, il est bon de faire un point sur l'état actuel du marché, de battre en brèche certaines idées reçues, et de vous mettre en garde contre certaines facilités.
Après tout, nous parlons de faire le budget de petites productions, mais aussi garder les priorités là où elles doivent être. Faire un film, c'est d'abord un travail. Un travail collectif. Et c'est vers là que vos finances devraient aller en priorité.
Un aveu... à partager
Même si on aborde ici le matériel technique, on ne va pas beaucoup parler de technique. Et cela pour une très bonne raison: je n'ai aucune connaissance en la matière. Et c'est en fait bien normal.
C'est le métier des responsables de poste de s'intéresser aux spécificités, au rendu, aux avantages et inconvénients de chaque outil. Ils peuvent, mieux que quiconque, savoir quel appareil utiliser pour obtenir le rendu que désire le/la réalisateur.rice.
Loin d'être un handicap, je pense même qu'il est sain que des personnes n'aient pas ces connaissances dans le domaine. Cela permet de garder une certaine naïveté, d'interroger les fausses évidences, de se poser les bonnes questions.
Un effort collectif
Dans cette partie du budget encore plus qu'ailleurs, il est indispensable de faire le travail en commun. Chaque chef.fe de poste doit être présent.e, confronter ses demandes à celles des autres, faire correspondre leurs besoins. D'autant que chacun.e évolue dans une niche professionnelle où tout le monde se connaît. Ce sera l'occasion pour eux/elles de faire part de bons plans, de possibilités de trouver du matériel moins cher, à prêter, des échanges de bons procédés. C'est dans ces moments d'échange que les meilleures économies se font.
Attention aux choix de confort
Attention cependant, car l'effet inverse est aussi possible. Certain.e.s responsables de poste auront tendance à faire gonfler leurs besoins matériels. De bonne fois, certes. Mais ils/elles pourront aussi ajouter du matériel "au cas où", comme une manière de se rassurer. Il ne faudra pas hésiter à interroger ces besoins. Voire, si c'est vraiment nécessaire, à les inciter à travailler en enveloppe fermée.
Quoi qu'il en soit, et encore plus dans le cas de petites productions, tout cela est une négociation. Si un.e technicien.ne qu'il vous tient à coeur d'avoir dans l'équipe ne peut pas être payée correctement, il peut être avisé de lâcher du lest sur ses dépenses en matériel. Il.elle trouvera son intérêt dans l'expérimentation de nouveaux outils.
D'autres accepteront peut-être de laisser tomber leur rémunération contre une location de leur propre matériel.
Dans cette négociation, il y a en gros une règle à suivre: soyez économe mais pas radin.
Acheter ou louer ?
Etant donné la chute drastique des prix du matériel, il peut être intéressant d'acheter plutôt que de louer. Après tout, une fois la matériel acheté, ce sont des dépenses en moins pour les prochains projets.
Il vaut mieux néanmoins y réfléchir à deux fois.
D'abord, êtes-vous sûr que vous réutiliserez exactement le même matériel sur vos autres projets? Et sera-t-il encore aussi à la pointe à ce moment ? Avez-vous pris en compte le coût et la disponibilité des accessoires ? Et l'entretien, le stockage, l'assurance ?
La location, même si elle paraît plus chère sur le coup, comprend tous ces coûts supplémentaires. En vous offrant en plus une plus grande flexibilité dans le choix du matériel. Car une fois que vous avez acheté votre matériel, vous DEVEZ l'utiliser pour le rentabiliser. A moins de le louer, ou d'avoir un volume d'activité conséquent, il est très difficile de rentabiliser du matériel audiovisuel.
Enfin, sachez que ce matériel n'entrera pas comme justificatif de dépenses auprès des organismes de financement une fois qu'il a été acheté. Vous aurez donc en fait (un peu) plus de mal à vous financer sur vos projets suivants !
Il y a donc un effet pervers caché derrière l'achat de matériel. C'est pourquoi si peu de sociétés de production y investissent.
Attaquons dans la leçon suivante le premier des postes matériel: les caméras.